Pourquoi les jeunes apprentis s’éloignent de la politique en Suisse romande : analyses et enjeux démocratiques
Constat central
Selon Vanessa Juarez, chercheuse à l’UNIL et coautrice d’une étude publiée dans le Journal of Community & Applied Social Psychology, le vote représente pour les jeunes apprentis un geste plus complexe que prévu. L’enquête, réalisée entre 2021 et 2022 auprès de 99 jeunes Romands en formation, montre que voter va bien au-delà d’une simple opération technique.
Une relation à la politique et à la communauté
Pour ces jeunes, voter incarne une relation à la politique, à l’État et à la communauté. C’est aussi vivre le sentiment d’appartenir et de contribuer à quelque chose de positif pour la collectivité, avec l’espoir que leur voix soit entendue.
Un écart entre perception et réalité
Les entretiens révèlent toutefois un constat partagé: les apprentis ont le sentiment que ce ne soit pas nécessairement le cas dans la pratique. Ils estiment que les détenteurs du pouvoir ne les entendent pas en raison de leur âge et ressentent fréquemment une dévalorisation liée à leur statut d’apprenti.
Des représentations qui ne leur ressemblent pas
Les jeunes rencontrés ne se reconnaissent pas dans l’image habituelle des politiciens suisses, décrite comme masculine, blanche et âgée, portant des costumes et des cravates, et affiliée à un discours parfois perçu comme déconnecté des réalités quotidiennes. En les interrogeant sur ce portrait, ils répondent que ce cliché ne correspond pas à leur classe.
Des compétences et une démocratie en question
Ils estiment manquer de compétences et considèrent que la politique demeure l’apanage des experts et des personnes ayant fait de longues études. Cette perception nourrit un sentiment d’insuffisance et de non-aptitude.
Conséquences pour la démocratie et les perspectives d’évolution
Selon Juarez, ce manque d’inclusion contribue à une surreprésentation des personnes très instruites dans les parlements et les processus électoraux, alimentant une réflexion sur les formes de démocratie qui devraient être repensées.
Quelles pistes pour changer la donne ?
Les apprentis proposent plusieurs pistes pour favoriser leur participation, notamment l’accès à une formation civique et, surtout, des espaces d’apprentissage actifs. Des cours où l’on débat, où l’on apprend à forger une opinion et à rechercher l’information, mais aussi des rencontres avec des responsables politiques et des visites des lieux où se décide la politique, afin de voir que c’est une réalité vivante et non une liste de chiffres à réciter lors d’un test.
Pour aller plus loin
Pour approfondir, voir aussi l’article Les jeunes Suisses et les politiques, histoire d’une déconnexion croissante.
Propos recueillis par Julie Marty
Article web : Julie Marty