Crise sanitaire mondiale liée à la surconsommation d’aliments ultra-transformés
Impact sanitaire des aliments ultra-transformés
Une étude publiée dans The Lancet, soutenue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Unicef, a été menée par plus de quarante experts internationaux spécialisés en nutrition. Elle définit les aliments ultra-transformés comme des préparations commerciales élaborées à partir d’ingrédients peu coûteux dérivés d’aliments entiers, associées à des additifs et comportant pour la plupart peu ou pas d’aliments entiers.
Nuggets de poulet, yaourts aromatisés et barres chocolatées illustrent aujourd’hui une réalité: ces produits représentent environ 80 % de l’offre des aliments, selon les propos rapportés de Roger Darioli, médecin et vice-président de la Fondation suisse de nutrition et santé, dans La Matinale de la RTS. Il souligne leur omniprésence et leur présence dans des lieux inattendus, notamment dans une salle d’attente d’hôpital où l’on peut trouver ce type d’aliments à l’automate.
Risques pour la santé
Les aliments ultra-transformés sont associés à un risque accru d’obésité, de diabète de type 2, d’hypertension, de maladies cardiovasculaires et de dépression. Selon Darioli, lorsque la part des calories provenant de ces aliments dépasse 20 % des besoins énergétiques, le risque augmente.
Des données de l’étude indiquent une progression générale de ce taux, avec des pays situés au-dessus de ce seuil. Au Canada, la part énergétique des achats alimentaires totaux attribuée aux aliments ultra-transformés a presque doublé sur une période de huit décennies, passant de 24,4 % à 54,9 %. Des recherches menées aux États-Unis et au Royaume-Uni montrent de leur côté qu’elle dépassait déjà 50 % il y a environ 20 ans. Des estimations de l’évolution dans neuf pays, basées sur des enquêtes nationales sur les achats ou la consommation, viennent étayer ces tendances.
Informer le consommateur et agir sur les choix
Pour réduire l’emprise de ces aliments omniprésents dans les supermarchés, Roger Darioli propose trois axes d’action. D’abord, une meilleure responsabilisation des pouvoirs publics dans le cadre des politiques de santé. Ensuite, des mécanismes destinés à encourager les grands producteurs et distributeurs à proposer des produits plus favorables à la santé. Enfin, une attention accrue portée au consommateur, qui, face à la facilité actuelle, peut être amené à privilégier ces choix.
Selon lui, il est crucial que les consommateurs disposent d’informations fiables et de connaissances solides en matière de santé. Il faut leur permettre d’accéder à une information de qualité, de comprendre cette information et de la mettre en pratique au quotidien. En Suisse, ces compétences restent insuffisamment développées, selon ses observations.
Moyens de contrainte et cadre réglementaire
Une part de son propos porte sur des outils et des mesures de sensibilisation. Il plaide en faveur du Nutri-Score et de l’inscription des dangers sur les emballages, comme c’est le cas pour les paquets de cigarettes, afin de pousser les acteurs du secteur à modifier leurs produits. Il rappelle aussi que le pouvoir des consommateurs peut influencer les pratiques des grands groupes lorsque l’information est claire et accessible.
Concernant la réglementation, Darioli estime que la loi sur les denrées alimentaires ne distingue pas suffisamment entre aliments non transformés, peu transformés et transformés. Le système actuel de surveillance repose largement sur les contrôles que les entreprises elles-mêmes effectuent, ce qui, selon lui, laisse une marge d’action forte pour les producteurs.
Propos recueillis par Yann Amedro. Adaptation web : Emilie Delétroz